Affichage des articles dont le libellé est yoga. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est yoga. Afficher tous les articles

dimanche 24 avril 2011

A Tale of the Hipster


Chers tous,

Si je vous dis "bobo", vous me répondez... Pansement? Wrong! La bonne réponse est bourgeois-bohème bien-sûr! Le bobo ultime pourrait être incarné par le Parisien de la rue de Charonne (enfin côté Bastille, faut pas déconner non plus!), celui qui n'a de réellement rebelle que la mèche de cheveu, et qui arbore une tenue déjà froissée-trouée avant même d'avoir été jamais portée, nonchalamment accessoirisée par une clope au bec et, surtout, un café Starbucks à la main, puisque, vu de la France, la destination bobo par excellence est New York, New York! Et, indeed, le bourgeois-bohème parisien a tellement profité de la belle époque où l'euro était beaucoup plus fort que le dollar, il a tellement traîné ses guêtres made in Comptoir des Cotonniers le long de Bleeker Street, Prince Street, Orchard Street et Bedford Avenue que ça devait finir par arriver... le bobo a réussi à s'inviter dans les pages du prestigieux New York Magazine, l'hebdo qui décrypte toutes les tendances politiques, économiques et culturelles de la grosse pomme !

NY Mag, pour les intimes, est devenu mon compagnon de route indispensable dans le métro, et remplace presque à merveille ELLE pour le fun, et Télérama pour le fond. Cette semaine, pour son édition "internationale" annuelle, on y trouve un portrait de la capitale française, version "Not For Tourists"... Un travail journalistique digne d'un instantané de Cartier-Bresson version 2011, qui m'a fait un plaisir fou parce qu'avec mes bientôt trois ans à New York, je suis au moins autant branchée sur ce qu'il se passe au cœur de Paris que les habitants du 16e: ) Et comme toujours, le magazine ne déçoit pas, tout y passe: Marine Le Pen, Martin Parr à la Goutte-d'or, Le Baron et... le bobo, donc, sous la forme d'un "illustrated guide"! Je tenais à souligner cet exploit parce que, même pour les sociologues français modernes, le bobo est un concept pratiquement indéfinissable, un paradoxe intrinsèque, puisqu'on peut difficilement associer deux entités plus opposables que le bourgeois et le bohème!

On rencontre le même problème de définition avec l’équivalent du bobo aux États-Unis, une créature urbaine typiquement new yorkaise, et plus particulièrement brooklynite: j'ai nommé le hipster. Un concept pourtant devenu ici tellement familier que le New York Times a demandé à ses journalistes d'en refréner l'usage dans leurs pages! Le hipster, tout comme le bobo, se démarque à première vue par ses choix vestimentaires ultra-stylés et androgynes, que l'on pourrait qualifier de "rétro-gardistes" (beaucoup de vintage) mais, à la différence de Paris, le hipster garçon ou fille est souvent couvert de tatouages (cela m'a absolument sauté aux yeux lors de mon arrivé New York à l'été caniculaire 2008)... Le hipster possède un tempérament d'artiste, ou tout au moins de créateur de tendances, et un comportement alternatif, sans être asocial. A la fin de mes années collège, avant même d'avoir mis les pieds à New York, et encore moins à Brooklyn, mon obsession pour Leonardo DiCaprio et les surfeurs a commencé à s'estomper, et j'ai développé un faible pour Jared Leto et "tous ces Américains qui ont l'air cool" (le terme "hipster" n'avait pas encore envahi le langage courant à l’époque). Je lisais déjà les récits trash d'Hubert Selby Jr. (l'auteur de Requiem for a Dream), et j’étais fan absolue du premier film de Sofia Coppola, Virgin Suicides. A chacun sa crise d'ado n'est-ce pas!

C'est pourquoi quand je suis arrivée pour de bon sur la côte Est des États-Unis pour faire une année d’échange universitaire, j'ai eu du mal à trouver mes marques parmi les Américains cliché-esque que je côtoyais sur le campus, car ils ne ressemblaient pas du tout à Jordan Catalano! Carrure de footballer (à ne pas confondre avec la taille fine du joueur de "soccer"), fringues informes aux couleurs de l'école, et tongs en plastique même par temps de pluie, étaient de rigueur. Alors, sans surprise, les étudiants qui m'ont immédiatement tapé dans l’œil étaient les plus "hipster" d'apparence. Chez les filles, il y avait la célèbre J. du cours d'histoire d'art moderne, l’étudiante aux mille chapeaux et au sac de gym en nylon qu'elle utilisait comme cartable bien avant qu'American Appareil ne lance la mode. Chez les garçons, je guettais ceux qui arboraient sur la promenade principale du campus un signe certain de hipsterism aigu: le pantalon retroussé sur un mollet (mais attention, un seul mollet!)... tous ceux qui possèdent un vélo en ville savent de quoi je parle! Bien sûr, tout cela ne constituait que des indices superficiels, et après la phase d'observation, il était temps pour moi de passer à l'action!

J'ai rapidement jeté mon dévolu sur A., un petit Californien aux boucles d'or qui trimbalait constamment son appareil photo Olga en bandoulière. Nous n'avions aucun cours ou amis en commun, mais je comptais au max sur ma French touch pour lui laisser une impression mémorable lors de notre première rencontre au labo photo. Pari réussi sans trop de difficulté, sachant par exemple qu'il me suffisait de ne pas m'habiller en pyjama et veste polaire en public, comme la plupart des autres étudiantes, pour passer pour une fashionista locale! Le campus était un tout petit monde et j'ai vite appris à tomber "par hasard" sur A. à la sortie de son cours de philo, à la section audiovisuelle de la bibliothèque, ou encore à la terrasse d’Au Bon Pain café…

A chaque fois, mon hipster avait l'air ravi de me voir et mon côté fleur bleue interprétait dans ses attentions des signes qui ne trompaient pas: il m’embrassait sur les joues plutôt que de me faire un hug basique à l’Américaine, il me recommandait tel ou tel prof pour le deuxième semestre, il me proposait même d’emprunter un de ses appareil reflex qu’il n’utilisait plus pour mes travaux du cours photo… Mais je commençais à m'impatienter et,  pour accélérer un peu le processus, je décidais de tenter une approche oh-so-hipster : j’acceptais l’offre de prêt d’appareil photo de A. en coinçant un petit message écrit de ma plus belle plume sur son vélo. En conséquence, j’obtenais son numéro de téléphone et décidais de lui proposer de se joindre à mes amis des quatre coins du monde lors de  l’une de nos prochaines virées de groupe. Je donnais à A. l’embarras du choix : soirée en boite downtown  le jeudi ; soirée tranquille dans le seul bar du campus interdit aux moins de 21 ans le vendredi ; pre-game chez Pablo l’Espagnol puis fraternity party chez Pablo le Colombien le samedi ; ou brunch le dimanche (clairement, j’ai atteint mon pic en terme de sorties nocturnes lors de mon année à l’étranger !) A. était toujours aussi aimable avec moi mais ne s’est jamais joint à nous...

Entre temps, j’avais rencontré celle qui allait devenir pour les années à venir ma meilleure amie américaine, une étudiante qui détonnait sur le campus sans pour autant partager de points communs avec le groupe des hipsters, si ce n’était un intérêt pour le yoga bikram ! Contrairement à A.,  elle s’était intégrée avec enthousiasme dans la bande des étudiants étrangers. Et, particularité tout à son honneur dans une Université dominée par une école de commerce et une école de médecine, elle s’était spécialisée dans un domaine qui allait se révéler fort utile pour moi : l’anthropologie. En effet, elle était devenue très perceptive et, comme on dit en Anglais, she could read people very well… Lorsque nous étions assez proches pour que je lui fasse part de mes frustrations avec A., je lui expliquais que je ne comprenais pas pourquoi il ne semblait pas désireux de mieux me connaitre ou de rencontrer mes amis. Elle ne prit pas de gants pour m’annoncer qu’elle le trouvait "obnoxious" (prétentieux). Surprise par ce commentaire, je lui répondis que j’avais interprété son détachement général comme un aspect zen de sa personnalité "hipster". Aussitôt, elle me délivra le coup de grâce : « Marion, can’t you see ? He’s not a real hipster ! » Elle continua son explication (je traduis) : « Il vient d’une famille très riche, se donne plus de mal que nécessaire pour se détacher de la masse des étudiants qui sont pourtant issus du même milieu privilégié que lui, il se croit supérieur aux autres… c’est un faux hipster ! » Un faux hipster ? Mais c’est bien sûr !

Soudain je me demandais comment j’avais pu avoir un faible pour A. tout ce temps ! Je réalisais que son aura de coolitude était savamment travaillée à coup de chemises en flanelle à la Kurt Cobain, le désespoir en moins et le prix exorbitant en plus ; et que, s’il faisait du vélo, ce n’était sans doute pas pour préserver l’environnement mais plutôt pour ne pas avoir à dire bonjour aux moutons qui se rendaient en cours à pieds, comme tout le monde. Ma dernière rencontre avec A. acheva de me convaincre que mon amie avait vu clair dans son jeu. Nous étions sur le point de finir l’année scolaire et, peut-être parce que c’était désormais moi qui l’ignorais (ce qui avait dû froisser un tantinet son ego), A. m'interrogea sur mes projets futurs d’un air presque sincèrement intéressé. J’évoquais alors mon envie de continuer à étudier l’histoire du cinéma américain et mon projet professionnel fraîchement défini de travailler dans une institution culturelle. A. semblait perplexe. Après quelques instants de silence, il me demanda le plus sérieusement du monde « Mais Marion, vraiment, qu’est-ce que tu veux faire dans la vie ? »… Je n'aurais pas dû être surprise et juste m'éclipser à ce moment-là, mais j'étais curieuse de savoir ce que A. lui allait faire de sa vie après la fin de ses études. Il commença à me parler d'une retraite dans le Colorado pour être plus proche de la nature et de continuer à faire des photos, bla, bla bla. Peut-être qu’A., était sincère. Ou peut-être qu’A. venait de lire Into the Wild. Laissons-lui le bénéfice du doute…

Quelques mois plus tard, je déménageais à New York, la capitale de la planète hipster par excellence, bien décidée à ne pas me faire avoir une deuxième fois…

Dans un article à venir très prochainement sur ce blog, je vous ferai part de mes astuces pour distinguer le vrai hipster… du faux ! (Et en bonus, ma traditionnelle liste de films liés au sujet)

dimanche 12 décembre 2010

Gunshots and Chakras

Chers tous,


Des anecdotes comme celle-là j'en ai tellement... Un beau jour, j’ai croisé Alec Baldwin près de Gramercy Park en route pour le boulot et puis, après le boulot, Vampire Weekend au boulot… en train de faire la promo de leur nouvel album. C'est ça la magie de Disneyland New York! Mais je voulais vous parlez d'autre chose. J’ai reçu un email horrifiant d'une amie m’informant indirectement que le centre de méditation qui a organisé les séminaires que j’ai suivis à New York, fondé par Sri Chinmoy, est considéré en France comme une secte ! Et bien je l’ai échappé bel on dirait ! De toute façon, comme vous l’avez lu, j’en étais arrivée par moi-même à la conclusion que la méditation/abstinence ça ne me convenait pas. Alors je me suis dit que je pourrais tenter le yoga, combinaison parfaite de sport et de relaxation, n’est-ce pas ? Attention, là je vais faire une phrase qui va vous paraître absurde, mais je vous préviens, tout est vrai… Brace yourselves !

Donc un samedi matin, je me mets en route pour un cours de yoga après une soirée bien arrosée (puisque j’avais laissé tomber la méditation), qui avait commencé uptown avec la famille de mon Américain, et finie downtown dans un bar-karaoké pour l’anniversaire de son amie chanteuse d’opéra ; ensuite j’avais dû dire au revoir à mon Américain qui allait passer une semaine dans un camp de nudistes gays pour tourner un film de commande très bien payé ; avant d’aller me coucher et de me faire réveiller au milieu de la nuit par un son évocateur de films de gangsters, et de me dire « c’est pas possible, s’il s’agissait vraiment de coups de feu, je devrais déjà entendre les sirènes de police » ; et de me demander mollement si ma colocataire qui fait barmaid tous les vendredi soirs était déjà rentrée ; et puis de me rendormir aussi sec en songeant « enfin bon, c’est New York quand même »… Ouf !

Turns out… Oui, il s’agissait bien d’un meurtre, dans ma rue (Alphabet City), juste en face du bar-karaoké où j’étais quelques heures plus tôt et, non, ma coloc n’était pas encore à la maison au moment des faits, elle est passée plus tard juste à côté des voitures de police que je n’avais pas entendues dans mon demi-sommeil. Je réalise donc en sortant de chez moi ce matin là qu’on est bien aux Etats-Unis, que certaines personnes se baladent bien avec des armes à feu en toute liberté (si seulement il y avait aussi une Statue de l’égalité, de la fraternité, et même de la laïcité ici ce serait pas mal !), et qu’Alphabet City reste fidèle à sa réputation du dernier quartier downtown parfois craignos tard le soir… bon esprit pour commencer ma matinée de yoga!

Ma dernière (et seule ?) expérience de ce "sport" c’était du temps de mes années d'étudiante à Lyon, quand j’allais au club de gym de l’autre côté du pont… Avec mes colocs on s’étaient inscrites toutes ensemble, mais j’étais la plus assidue (héhé), la chouchoute de Maurice, notre prof body-buildé décrépi. Dans mes souvenirs, le yoga c’était de l’encens, la voix suave de Maurice, la positon du lotus, les exercices de respiration et… il faut bien le dire, assez chiant ! Depuis que j’avais commencé à courir, j’avais trouvé ma drogue la plus saine, mais, dernièrement, mes genoux était devenus un peu trop fragiles, c’est pourquoi je recommençais à songer au yoga. Et puis le yoga c’est soooooo New York.

C’est tellement populaire ici que je croise en permanence des hipsters avec leur Mud coffee (le café pour les anti-Starbucks altermondialistes du East Village) dans une main et leur tapis de yoga dans l’autre… C’est tellement populaire qu’il existe des clubs aux quatre coins de la ville qui proposent toutes sortent de variations obscures pour les néophytes comme moi : Hatha Yoga, Bikram Yoga, Ashtanga Yoga, sur Wikipedia ils listent aussi le Doga=Dog Yoga, et pour les exhibitionnistes, le Naked Yoga… C’est tellement populaire que le New York Times peut publier un article de trois pages à propos du yoga dans sa section gastronomie. C’est tellement populaire qu’il existe une marque de vêtements spécial yoga, "lululemon", qui vend des caleçons à plus de 100 dollars comme des petits pains. Conclusion, la pratique du yoga est tellement populaire… que c’est un luxe ! New York, la ville paradoxe, je vous le répète ! Car la philosophie du yoga c’est plutôt l’humilité et la frugalité, il me semble ! Heureusement, il existe une association ("Yoga to the People") qui propose des cours gratuits ou presque : il faut faire une donation.

Sans hésiter, je me dirige vers leurs locaux, et me retrouve pour mon premier cours de yoga New Yorkais dans une salle bondée où chaque centimètre compte pour faire réussir à rentrer tous ces généreux donateurs… Ça commence bien ! Il y a tellement d’élèves que je distingue à peine la prof, mais je dois pourtant réussir à adopter des positions qui ne me sont ni familières, ni naturelles, et encore moins confortables… Je prends pour modèle l’une des filles situées à mes côtés qui a l’air de savoir ce qu’elle fait et tente de créer l’illusion que moi aussi je peux être un "Downward Facing Dog", "Upward Facing Dog", "Awkward Chair", "Warrior I", "Warrior II".


L’horreur ! Je transpire parce que c’est l’été. Beaucoup. Lorsque j’essaye de passer ma jambe par dessus mon épaule en bloquant avec mon bras (enfin, un truc dans le genre), et bien ça glisse ça glisse ça glisse… En plus la position "de repos", c’est à quatre pattes avec tout le poids du corps dans les avant-bras, je vous dis pas comme c’est pas du tout reposant ! Et avec ça, je suis censée me détendre malgré la consternation que provoquent chez moi les soupirs et gémissements extatiques de mes camarades de classe, je suis censée respirer en harmonie avec les mouvements erratiques de mon corps afin de profiter de ces sensations pleinement, le tout coincée entre la baba cool qui ne se rase pas les aisselles et le mec en transe spirituelle au torse nu luisant, pendant que la prof, béate, conclut la séance, par trente secondes de philosophie de supermarché. Mais où est Maurice ? 

Rétrospective "Gunshots and Chakras": 
Klute (Alan J. Pakula, 1971)